La civilisation du vase campaniforme au Maroc et la question   du substrat chalcolithique pré campaniforme.

 
La question de l'existence d'un Age des métaux en
Afrique du Nord a fait couler beaucoup d'encre. Elle a été
à l'ordre du jour lors de nombreux congrès archéologiques. 
Pendant le IIème congrès panafricain de préhistoire en 1952,
presque tous les chercheurs étaient d'accord sur le fait
que les populations d'Afrique du Nord avaient ignoré
l'usage des métaux jusqu'aux premiers contacts avec les
Phéniciens et les Romains. Maurice Antoine affirmait
que les Phéniciens ont rencontré des populations
vivant encore au stade néolithique et M. Saez-Martin s'est
exprimé dans le même sens en doutant de l'existence d'un
âge des métaux.
Jusqu'en 1960, l'opinion dominante au sein de la
communauté scientifique fut que les populations
paléoberbères étaient passées directement du Néolithique à
l'Age du fer sans connaître auparavant l'usage du cuivre et
du bronze. C'est à Gabriel Camps et Georges Souville que
revient le mérite d'avoir, les premiers, réfuté de telles
hypothèses et d'avoir rassemblé les documents
archéologiques permettant d'affirmer l'existence d'un âge
des métaux en Afrique du Nord, surtout dans sa partie
occidentale. C'est en suivant les courants de la civilisation du
vase campaniforme, déjà connue en Europe, qu'on s'est rendu
compte  que cette civilisation s'est également développé au
Maroc et qu'elle a été accompagnée par la diffusion
d'objets en métal. En effet, il
aurait été étonnant que les détenteurs de vases
campaniformes, qui ont peuplé ou visité des îles éloignées
du continent européen, aient pu ignorer les côtes marocaines. Le
détroit de Gibraltar, qui sépare le Maroc de l'Espagne ne
dépasse point 14 km, dans sa partie la plus étroite.

 Alors que l'Andalousie et
le Sud du Portugal avaient connu une culture campaniforme
très développée, le Maroc, pourtant très proche, n'a livré
de tessons identifiables comme campaniformes que récemment.
C'est à Alberto de Castillo que nous devons
la première identification  de la céramique  campaniforme marocain, et ce  lors du premier congrès archéologique du Maroc espagnol, tenu à Tétouan en 1953.
Antérieurement, d'autres tessons campaniformes  avaient été découverts
sans être franchement rattachés à cette civilisation;
c'était le cas de certains tessons découverts dans les
grottes d'Achakar et de Dar-es-Soltan. Depuis, nos connaissances sur le Chalcolithique au
Maroc ont nettement évolué durant ces cinquante  dernières
années.
 I- civilisation campaniforme

La civilisation du vase campaniforme est attestée dans
diverses régions du Maroc, aussi bien sur le littoral qu'à
l'intérieur des terres. Jusqu'à très récemment, on croyait
que la pénétration d'objets campaniformes fut uniquement
littorale. Ceci a amené plusieurs auteurs à affirmer que
les éléments essentiels de cette civilisation ont été
importés de la péninsule ibérique. Avec le développement
des connaissances sur cette période, on commence à remettre
en cause de tels propos et à penser de plus en plus qu'il
est possible que certains objets aient été fabriqués sur
place.
La quasi totalité des tessons campaniformes trouvés au
Maroc provient des grottes, mais on ne pourrait affirmer que
l'habitat en grotte était le plus fréquent à cette époque
ou s'il s'agit simplement du hasard des découvertes.

La céramique campaniforme n'est pas le seul élément caractéristique du Chalcolithique au Maroc. Elle a été fréquemment trouvée avec des objets en cuivre et des pièces lithiques très évoluées.
1.      Les grottes d'Achakar ( Cap Spartel)
La première découverte d'objets appartenant à la
civilisation du vase campaniforme au Maroc provient des
fouilles effectuées par R.P. Koehler dans la grotte
d'Achakar au cap Spartel.





2- la grotte de Gar Cahal ( région de Ceuta)   
 
les fouilles effectuées par Miguel Tarradell dans la grotte Gar Cahal de ont livré un matériel archéologique abondant appartenant à la civilisation campaniforme.  

                                         

        

   3- Grotte de  Kahf Taht el Ghar ( région de Tétouan)

Le matériel céramique campaniforme de Kahf Taht el Ghar, et qui provient des fouilles de Miguel  Tarradell  
se  compose  de 12  tessons  ayant  appartenu  à  10 ou 11 vases  
différents, dont trois à des Cazuelas (Harrisson et Gilman,1977). Les décors sont quasiment identiques à ceux
de Gar Cahal. On retrouve généralement
des bandes horizontales de traits pointillés obliques,
séparées par des bandes lisses non décorées; d'autres
bandes sont remplies de lignes pointillées horizontales ou
verticales.(fig.5)
        
                          
4-      L'industrie campaniforme de Mehdia (région de Kénitra)

La collection de Mehdia est composée de céramique et
d'objets lithiques. Seuls trois tessons de céramique sont
présents dans la collection. Ils ont appartenu à des vases
différents, mais l'un des tessons a permis une
reconstitution graphique de la forme du vase ainsi que de son décor. Il s'agit d'une jatte de forme hémisphérique analogue à celle de Dar-es-Soltan.
  
                             

Ces tessons ont été trouvés avec trois pendeloques en terre cuite, de forme oblongue, possédant un trou de suspension dans la partie renflée, analogues à celles de Kehf el Baroud.(fig.6)

5-      Grotte de Dar-es-Soltane ( plage de Rabat)

  Les fouilles effectuées par Armand Ruhlmann dans la grotte de Dar-es-Soltan ont livré parmi le mobilier archéologique du niveau B un vase campaniforme presque complet. (Ruhlman, 1951).




                               



 
 La cazuela campaniforme de Dar-es-Soltan présente un
profil et des dimensions analogues à ceux de certaines
"cazuelas" de Estoril, de Palmella et surtout de Marchena
. (Castillo,1953).

Mis à part ce vase complet, la couche B de Dar-es.Soltran a livré de nombreux tessons appartenant à des vases campaniformes (fig.10). Il existe quarante-sept
petits tessons décorés au peigne denté. (Souville,1977). Ces tessons
sont décorés de motifs différents de ceux de la cazuela :
il s'agit de lignes obliques verticales et de chevrons. André Jodin a examiné les tessons de Dar-es-
Soltan et affirme l'utilisation du peigne à dents carrées
ou émoussées pour la réalisation du décor campaniforme.(Jodin,1957a).

                                                                       


La céramique campaniforme de Dar-es-Soltan a été
vraisemblablement fabriquée sur place. La découverte parmi
le mobilier archéologique de la couche B d'une spatule en
os présentant des dents sur ses bords plaide en faveur de
cette hypothèse. André Jodin a expérimenté cet objet sur de
la cire, les dents de la plaquette font apparaître un décor
pointillé typiquement campaniforme. (Jodin,1957a).(fig.12)
                                                                 
                                         


Les tessons campaniformes de Dar-es-Soltan ne se
rattachent  pas tous à des types connus dans la péninsule
ibérique. Certains auraient été probablement fabriqués sur
place. La présence de la spatule dentée en os permet de
supposer  l'existence d'une fabrication locale..
6-      la Grotte des Contrebandiers (sud de Rabat)
Les fouilles  effectuées par Jean Roche dans la grotte des Contrebandiers en 1957-1958, ont révélé les tessons d’une jatte campaniforme.

                                                            


Les autres tessons campaniformes de la grotte des
contrebandiers sont également décorés d'impressions de
lignes pointillées. Certains tessons sont comparables à
ceux de jattes bien connues à Carmona et dans tout le
campaniforme andalou. D'autres en revanche, ont appartenu à
des vases, dont les profils originaux, semblent particuliers
au Maroc. (Jodin,1957b)   
Ils pourraient s'agir de vases
fabriqués sur place par des artisans locaux, mais dont le
décor trahit une influence campaniforme certaine.

7-      Sidi Slimane (plaines du Rharb)
Il  s’agit de deux vases découverts fortuitement lors de travaux agricoles dans les plaines atlantiques de  la  région de Sidi Slimane, à 60 Km du littoral. Il semblerait qu’isl ont appartenu à une sépulture. (Souville,1977,p.569 et 1984,p.241)
                       


   8 – La grotte de Kehf el Baroud ( région de Casablanca)

Située à l’est de Casablanca et à environs 30 Km de la côte atlantique, la grotte de Kehf el Baroud a bénéficié de trois programmes de fouilles très espacés dans le temps. C.Plessis a recueilli dans les années 1950, une alène en cuivre et une plaquette rectangulaire en schiste, dotée d’un trou biconique.(fig.) Les travaux effectués par Allain de Wailly ont mis au jour d’autres objets en cuivre : une grande alène en cuivre forgé et une hache plate en cuivre rouge fortement oxydé (fig.) et une pointe de flèche à pédoncule finement retouchée .( Wailly,1973-75) Les récentes fouilles que nous avons menées personnellement, en collaboration avec A.Mikdad,  en 1992 et 1993, dans le cadre d’un programme de recherches marocain de l’Institut National des Sciences de l’Archéologie et du Patrimoine, ont fourni quelques tessons campaniformes.(fig.16)
                 

                                                                                                       
La grotte de Kehf-el-Baroud a livré deux pendeloques en terre cuite, presque identiques.(fig.16) Elles sont de forme conique, et présentent la même convexité générale, les mêmes sections, et sont dotées de perforations obtenues avant la cuisson. . Les pendeloques en terre cuite comme celles de Kehf-el- Baroud accompagnent souvent la céramique campaniforme au Maroc. On en a trouvé dans la grotte B d’El Khil, dans les sites de Mehdia., dans la grotte de Tamaris . Leur forme conique  rappelle celle des figurines anthropomorphes en terre cuite de la grotte des Idoles à Achakar. (Bokbot,1991)

Ce matériel était accompagné d’une pendeloque en schiste, de forme rectangulaire, dotée d'une perforation biconique, identique à celle qu’a découvert Allain De Wailly dans ce même site en 1973. (Wailly,1973) Parmi les objets de parure figure un bouton en cours de fabrication, de forme hémisphérique, portant des traces d’une amorce de perforation par percussion. (fig.16) (Mikdad,1997)

                                    

 Une datation par Thérmoluminiscence réalisée dans le laboratoire du Physique à la Faculté de Sciences de l'Université Semlalia de Marrakech (K. Fahde, 1997), sur un fragment de céramique campaniforme a donné l'âge suivant:  5035 343 B.P.; 5254 524 B.P. Elle confirme la date obtenue par A. de Wailly. Ce qui confère au campaniforme du Maroc un âge très ancien.

                           
   9 - la grotte de Ain Smen ( région de Fès)

Située à 12 Km au sud de Fès, la grotte de Ain Smen n’a pas connu d’occupations successives. Les vestiges archéologiques  proviennent d’une seule occupation humaine datant du Chalcolithique. (Souville,1989)     
L'intérêt de cette grotte réside surtout dans la
présence de céramique campaniforme en un lieu très éloigné
du littoral, à une distance d’environ 150 Km. Ce fait est nouveau, car avant cette
découverte à Ain Smen, presque tous les sites ayant livré
des tessons campaniformes sont situés près du littoral et
seul les sites de Sidi Slimane et de Hassi Ouenzga  en sont relativement éloignés.



 
La couche II d'Ain Smen a livré 33 tessons appartenant
à des vases campaniformes.


Les décors de la céramique d'Ain Smen ressemblent à
ceux du groupe maritime andalou, surtout à celui de
Palmella. (Souville,1989)  Malgré la petite taille des tessons, certaines formes
peuvent être définies, qui correspondent à des bols et à
des cazuelas.
 Le matériel céramique campaniforme d'Ain Smen est accompagné de deux objets métalliques qui appartiennent au même horizon culturel. Le premier est une pointe à soie en
cuivre arsenié qui correspond aux pointes de Palmella. Elle est proche par sa forme générale du type C de G. 
Delibes de Castro. (Souville,1989) Le second est une épingle en cuivre
avec de faibles traces de plomb et d'arsenic; elle présente
un enroulement terminal sur six rangées. Ce type d'épingle à ganse,
très caractéristique du Chalcolithique et du Bronze
ancien, semble rare en Méditerranée occidentale alors qu’il est fréquent en Méditerranée orientale. (Souville,1989)   (fig.18)

                



  10- L’abri de Hassi Ouenzga ( Rif Oriental)
Situé à environ 60 km au sud-ouest de Nador sur la côte méditerranéenne du Rif oriental, l'abri de Hassi Ouenzga  a été découvert en 1995 par une équipe archéologique maroco-allemande. Ayant fait l’objet de fouilles en 1996 et 1997, il a livré trois tessons campaniformes portant le décor international fait de bandes à hachures obliques.
                     
Dans le littoral atlantique de Rabat-Casablanca , d’autres sites ayant livré des indices d’occupation
campaniforme ont été signalés. Dans la région de Rabat, des céramiques
campaniformes ont été découvertes à El Menzeh
. Près de Casablanca, la céramique campaniforme
devient rare et seule la grotte de l'oued Merzeg en a livré quelque tessons
.

La localisation de la majeure partie des tessons campaniformes sur la façade atlantique du Maroc laisse supposer que les influences campaniformes se sont infiltrées par le littoral atlantique et qu'il y aurait un courant culturel entre le sud-ouest de la péninsule ibérique et le Maroc atlantique. Nous pensons que l'absence d'objets campaniformes sur le littoral méditerranéen n'est pas uniquement liée à la rareté des recherches systématiques dans cette région mais qu'elle pourrait également
correspondre à une réelle absence de rapports entre cette
zone et les hommes du vase campaniforme. Mis à part les
gisements de Caf Taht el Gar et de Gar Cahal, qui sont très
proches du détroit de Gibraltar, les seuls gisements
relativement proches du littoral méditerranéen ayant livré
des tessons campaniformes sont situés  au Rif oriental (Hassi Ouenzga) et en Oranie (Rhar oum el Fernan et Oued Saïda, situés respectivement à 70 et 120
kilomètres à l'intérieur des terres. La
localisation de ces deux derniers sites loin du littoral a amené
Gabriel Camps à se demander si les campaniformes sont
arrivés en Oranie non pas par la Méditerranée mais par le
Maroc, en empruntant la trouée de Taza et les plaines de l’Oriental (Souville,1984 ;Camps, 1984)

Or, les dernières découvertes concernant cette période montrent que les objets campaniformes ont été également utilisés dans des régions très éloignées du littoral. Compte tenu de la multiplication des découvertes de sites campaniformes, il
est désormais difficile de continuer à nier une véritable
implantation de cette civilisation au Maroc. Nous pensons
qu'il ne s'agit pas d'une simple appropriation, par les
populations tardo-néolithiques du Maroc, d'objets fabriqués
dans la péninsule ibérique; d'ailleurs, certains éléments
archéologiques permettent d'avancer une hypothèse
contraire. A Dar-es-Soltan on a découvert une spatule
dentée en os qui a servi, sans aucun doute, à réaliser des
décors typiquement campaniformes. Cette possibilité d'une
fabrication sur place est d'autant plus plausible que les
poteries campaniformes sont moins fines que celles de la
péninsule ibérique et les décors ne se rattachent pas tous
au répertoire décoratif du campaniforme ibérique.





Les formes des vases ainsi que les décors du
campaniforme marocain ressemblent à ceux du sud de la
péninsule ibérique. La céramique campaniforme marocaine
tient ses prototypes de trois centres de production situés
en Andalousie et au Portugal. Le premier est situé dans le
bas Guadalquivir, près de Séville, le second au centre du
Portugal, autour de l'embouchure du Tage. Le troisième
centre qui a joué un rôle important dans la diffusion des
formes céramiques et des décors campaniformes est celui du
groupe de Palmella. L'influence de ce dernier groupe est
très sensible pour presque toutes les poteries
campaniformes des gisements marocains.


II – Chalcolithique précampaniforme

En général, on a tendance à faire coïncider le début
du Chalcolithique au Maroc avec le mouvement campaniforme. 
Cependant, le Maroc a certainement eu des contacts avec les
civilisations chalcolithiques précampaniformes du sud de la
péninsule ibérique. Les premiers chalcolithiques ibériques
ont façonné des objets de luxe dans des matières premières
importées d'Afrique du Nord. (G. Camps, 1984) Ces contacts ne pouvaient
s'effectuer à sens unique. Les populations post-
néolithiques marocaines recevaient en échange, des objets en métal,
tels  que pointes de Palmella, alènes, poignards et
haches en cuivre, ainsi que des
pièces lithiques finement retouchées telles que les pièces
foliacées  et les
poignards

. Les seuls gisements marocains qui pourraient
dater de cette période sont les nécropoles d'El Kiffen et
de Rouazi. Chronologiquement, ils sont contemporains du
début du Chalcolithique ibérique
. La datation radiométrique la plus haute situe l'occupation du site d’El Kiffen entre 3350 et 2660 av. J-C. (Debenat et Al., 1983-1984) ; ce qui correspond à une phase contemporaine de  
Los Millares et de  Vila Nova de Sao Pedro. 
C'est à la même période qu'il faudrait
vraisemblablement rattacher la nécropole de Rouazi-Skhirat,
au sud de Rabat. Ce site, composé de plus d'une
centaine de sépultures, est daté par le C14 de 4480! 190
B.P. (Bellouche,1980). On y a découvert un matériel céramique semblable
à celui d'El Kiffen. Il a aussi livré une industrie
osseuse très riche. Dans cette nécropole, on a également
découvert des objets en ivoire et des grains d'enfilage en
test d'oeuf d'autruche. Ce mobilier
archéologique seraient l'équivalent de ce que l'on trouve
dans les cultures chalcolithiques précampaniformes du sud
de la péninsule ibérique.( Onrubia-Pintado, 1988)

  1. La nécropole d'El Kiffen

Située à une trentaine de
kilomètres au sud-ouest de Casablanca, la nécropole d'El Kiffen est fouillée par P. Mieg de Boofzheim en 1956. l’intérêt de cette nécropole réside dans la caractère particulier des vases qui constituent l’essentiel du mobilier funéraire. La nécropole a livré, associés à des sépultures, 43 vases presque entiers, 2 fragments permettant de reconstituer la forme du vase, ainsi que 13 fragments indéfinissables.  Une datation radiométrique réalisée sur les ossements d’un squelette a fournis l’âge suivant : 4300 B.P soit 2342 av J.C. (Bailloud et Boofzheim,1964) 
La céramique d'El Kiffen est caractéristique par sa
forme et son décor. Les formes sont assez variées, on
trouve des bols et écuelles à fond hémisphérique, une
écuelle de forme ovale, un vase trononique à fond plat,
huit vases sphériques à col cylindrique et les vases à
épaulement qui constituent près de la moitié du matériel
céramique (46 %) (fig.11).

                                                  

La moitié des vases est décoré de motifs impressionnés
et presque tous les décors ont été faits avec un peigne à
dents carrées. Les motifs sont peu nombreux et
correspondent à une seule utilisation du peigne:
l'impression normale. Ces impressions sont disposées en
lignes qui constituent des décors linéaires. Le motif le
plus caractéristique et le plus utilisé se compose d'une ou
plusieurs bandes horizontales de chevrons qui couvrent soit
la partie supérieure des vases à épaulement, soit la panse
des vases sphériques à col.

La céramique d'El Kiffen est difficilement rattachable
à un horizon culturel nord-africain. La majorité des vases
présente des formes inconnues du Néolithique Nord-africain.
Il faut rechercher les éléments de comparaison dans le sud
de la péninsule ibérique. En effet, les vases sphériques à
col cylindrique sont très fréquents dans la civilisation
almérienne. L'écuelle à ouverture ovale et l'écuelle
tronconique à fond plat sont semblables aux formes
almériennes. Les bols à fond conique ou à parois presque
verticale et à fond légèrement convexe, ainsi que les
gobelets légèrement piriformes se rapprochent également des
formes de l'Almérien du sud de la péninsule ibérique. Toutefois, les formes d'El Kiffen paraissent correspondre à la phase finale de l'Almérien. Les formes cardiales ainsi que les formes typiquement argariques sont
absentes à El Kiffen.
Si les formes céramiques sont difficilement rattachables à un groupe culturel nord-africain, le décor, en revanche, n'est pas inconnu du répertoire décoratif des céramiques marocaines. Des décors analogues à ceux des vases d'El Kiffen ont été trouvés sur certains tessons de différentes grottes et stations de surface du littoral atlantique du Maroc: Temara, Dar-es-Soltan, oued Merzeg, El Khil et la station de l'oued Mellah. Le vase recueilli par Maurice Antoine à l'oued Mellah, présente un décor comparable à celui d'El Kiffen.(Antoine,1933) Il est intéressant de signaler que tous les sites ayant livré des tessons dont le décor s'apparente à celui d'El Kiffen ont livré également des objets typiquement campaniformes. G. Bailloud n'exclue pas une possible influence campaniforme dans le décor de la céramique d'El Kiffen mais il précise que les formes des vases sont nettement différentes de celles des vases campaniformes. Le décor pointillé est vraisemblablement d'inspiration campaniforme. On y trouve les mêmes bandes horizontales qui caractérisent la céramique campaniforme : bandes en chevrons, bandes de lignes pointillées horizontales et parfois verticales, des bandes horizontales remplies de traits verticaux ou obliques inclinés dans le même sens ou dans de sens différents.  L'absence de séquences stratigraphiques dans le néolithique du littoral atlantique marocain ne permet
pas d'être plus affirmatif quant à l'âge de la céramique
d'El Kiffen. Mais,  Il est hautement probable que cette
céramique appartienne au Chalcolithique. Le terme de
Néolithique employé par  Bailloud pour désigner la
nécropole d'El Kiffen n'a pas de valeur chronologique, il
traduit simplement l'absence de vestiges métalliques
permettant de rattacher cet ensemble au Chalcolithique.
Pour G. Bailloud, le mobilier d'El Kiffen est
représentatif de la fusion de formes indigènes et
d'éléments d'origine sud-ibérique parvenus par voie
maritime. (Bailloud et Boufzheim,1964)



  1. La nécropole de Rouazi-Skhirat

La nécropole de Rouazi est située au sud de Rabat,
près de la plage de Skhirat. Le site occupe une sablière
située sur la rive droite de l'embouchure de l'oued
Cherrat.  la fouille a permis de dégager 101 structures funéraires, sur une surface d'environ 900 m2(LACOMBE et DAUGAS 1988, LACOMBE et alii 1990)
. Le rite d'inhumation qui a été pratiqué
est celui en decubitus latéral contracté. L'une des
sépultures a été fortement ocrée.(Debenath et AIl, 1983-84)
Soixante-douze tombes contenaient un mobilier funéraire. Au total 132 poteries, 30 haches polies majoritairement en dolérite, 14 éclats de silex, 20 poinçons, 4 tubes et 8 lissoirs en os, .5 gobelets et 2 bracelets en ivoire, 1 parure de plusieurs milliers de rondelles de tests d'oeuf d'autruche, ont été recueillis. De plus un certain nombre d'objets ont été découverts hors stratigraphie avant la fouille : 33 vases ou fragments, 4 haches polies, 1 pointe de flèche pédonculée et 1 vase en pierre. Un vase entier et les morceaux, de trois autres récipients proviennent aussi du kjôkkenmôdding et de l'habitat démantelés par le paléo-oued.

                                                

La céramique de Rouazi présente des affinités indiscutables avec le
groupe d'El Kiffen , on y retrouve les bols et écuelles hémisphériques, les écuelles à bouche ovale et les gobelets à épaulement avec fond rond ou conique parfois ombiliqué. Les vases sphériques à col cylindrique sont absents à Skhirat où abondent en revanche des formes à fond plat : urnes à col dégagé ou non, écuelles carénées ou à épaulement, gobelets à parois verticales ou à épaulement. La forme la plus courante parait être celle de l'écuelle à fond arrondi ou aplati, avec ou sans épaulement. Les décors fait le plus souvent au peigne, Les motifs s'organisent en bandes horizontales ou verticales séparées par des lignes obliques ou des chevrons, mais l'on remarque aussi de larges plages d'impressions pivotantes. Les lignes incisées en chevrons ou en résilles sont également fréquentes. Enfin, un exemplaire d'écuelle hémisphérique porte des lignes d'impressions horizontales qui paraissent bien avoir été traitées à la cordelette. Hormis ce dernier fait, on remarque donc une grande similitude d'inspiration et de technique entre les modes décoratifs employés dans les deux sites. D'autant si l'on ajoute qu'environ le quart des vases de Skhirat porte l'engobe    à la barbotine rouge.

   

             

              L'abondance des haches polies et des objets en os est certes remarquable, mais la véritable singularité du cimetière de Rouazi réside dans le fait d'avoir livré des objets en ivoire, façonnés dans des défenses d'éléphant. Il s'agit de cinq gobelets cylindriques, à fond plat et parois rectilignes, (Daugas,2002) ainsi que deux bracelets ovalaires. Le site a également livré un vase en pierre, creusé dans un galet de dolérite, semblable à ceux découvert à Souk-el-Khémiss des Ait Ouahi. (Souville,1973)
                         

                                                                    
                         
-une série de datations se rapportant au Kjôkkenmôdding synchrone de la nécropole, daté par la thermoluminescence sur trois tessons (OUSMOI 1989) et par une mesure du radiocarbone sur charbons (DAUGAS et alii 1989), a donné les âges suivants :       • TK 1, Cle TL 137 = 5620 + ou - 350 B.P. (soit 3280 av.J.-C.),
• TK 2, Cle TL 138 = 5500 + ou - 1500 B.P. (soit 3520 av. J.-C.),
• TK 3, Cle TL 139 = 4400 + ou - 650 B.P. (soit 2420 av. J.-C).
• Ly 4096 = 4560 + ou - 150 B.P. (soit 3616-2898 av. J.-C).
une autre série de datations en relation directe avec le dispositif funéraire, a confirmé la chronologie obtenue :
                       • os humains de S 61, UQ 1868 = 5350 + ou - 150 (soit 4466-3828 av. J.-C),
                       • poterie de S 35, Cie T.L 140 = 5400 + ou - 450 B.P. (soit 3420 av.J.-C). (Daugas,2002)


C’est au Chalcolithique qu’il faut vraisemblablement rattacher deux objets lithiques trouvés hors contexte stratigraphique dans le site de Chellah à Rabat, non loin de l’embouchure de l’Oued Bouregreg. Il s’agit d’une figurine en andésite et d’une pointe foliacée bifaciale. La figurine de Chellah, pourrait être classée dans le groupe des idoles cruciformes du type II a du Bronze I ibérique, défini par Amagro Gorbea.  Elle témoigne de la présence de contacts entre les hommes chalcolithiques des plaines atlantiques du Maroc   et  la Culture de Los Millares  (Boube,1983-84)  La pointe quant à elle, ressemble par son allure générale, aux belles pointes sahariennes et à certains couteaux chalcolithiques ibériques.(Souville,1973) Elle est  longue de 8,15 cm et  présente de fines retouches en pelure sur les deux faces.

                                      



III - La métallurgie du cuivre au  Maroc
La majorité des objets métalliques qui pourraient se rattacher au chalcolithique ont été découverts dans différentes zones de la moitié nord du Maroc. La région de Casablanca est très riche en station de
surface qui ont fourni un matériel lithique et métallique
appartenant au Chalcolithique dont la célèbre pointe de
Palmella, récoltée par Maurice Antoine dans la station de
Sidi Messaoud.


 le site de Kehf Taht el Ghar  a livré  dans ses niveaux post-néolithiques une épingle et une hachette plate et en cuivre. (El Idrissi, 1993
            
Le site de Gar Kahal a lui aussi fourni une hache plate en cuivre, dont il ne reste que le talon.
                              

Le site de Kef el Baroud, à 30 km à l'est de Casablanca, a livré trois objets en cuivre, malheureusement dans une position stratigraphique peu précise. Il s'agit de deux alènes et d'une hache plate. Ces objets métalliques appartiennent, sans aucun doute, à un horizon chalcolithique.

                                                                    
                                                                                                      
 Les dates hautes obtenues dans la grotte de Kef el Baroud, plaident en faveur d'une introduction ancienne, vraisemblablement  précampaniforme de la métallurgie du cuivre au Maroc: Gif 2888 = 4750 + 110 B.P. (3785 à 3350 avant notre ère) et Gif 2889 = 5160 + 110 B.P. (soit 4315 à 3680 avant notre ère) (Wailly 1975, 1976). Si nous admettons la fiabilité de ces dates, on aurait
là la plus ancienne utilisation d'objets en cuivre au
Maroc. Ces objets ont vraisemblablement été fabriqués sur
place. Le site se trouve à 10 Km d’une mine de cuivre à ciel 
ouvert,   exploitée anciennement. Si nous admettons la fiabilité de ces dates, on aurait
ici  la plus ancienne utilisation d'objets en cuivre au
Maroc.

D’autres haches de formes et de composition  analogues ou distinctes ont été signalées  au nord du Maroc. L’on citera la hache plate conservée dans les réserves du musée de Tétouan.et la hache découverte dans les environs de Rabat, sur les borts de l’Oued Akrech, semblable à une hache de la Cueva de la Pileta (région de Malaga) qui était associée à une pointe en cuivre et un brassard d’archer appartenant à la civilisation argarienne.

                                                                 

Dans la zones de Tanger,  la nécropole mégalithique de Ain Dalia  a livré une alène en cuivre associé à une pointe de javeline également en cuivre, du type des poignards à languettes, en forme de feuille de laurier, longue de 60mm, dotée d’un pédoncule long de 30mm. (Buchet,1907) Cette pointe présente beaucoup de ressemblance avec le « poignard chalcolithique » de Cap Chénoua en Algérie occidentale. (Camps et Giot,1960)  

                          


                                                         


Au delà du triangle Tanger-Fès-Casablanca, on a
découvert des indices d'occupations chalcolithiques dans le
Maroc oriental et dans le Haut-Atlas. Au Maroc oriental, la grotte de Tendrara a livré, dans
son niveau supérieur, une pointe de flèche probablement
chalcolithique. Plus récemment on a découvert une industrie
chalcolithique assez importante dans la grotte d'El Heriga. 
Cette industrie est composée d'une pointe de flèche en
cuivre du type de Palmella, ainsi que d'armatures de
pointes de flèche en silex et en calcédoine.
Traditionnellement ces pièces sont considérées comme des importations ibériques et cela est sans doute justifié d'un point de vue typologique. En revanche, l'existence de mines de cuivre anciennes dans les environs de Kef el Baroud ainsi que la multiplicité des représentations d'objets métalliques parmi les gravures rupestres du Haut Atlas, plaident en faveur d'une métallurgie locale ancienne.  les dates hautes obtenues dans la grotte de Kef el Baroud plaident en faveur d'une introduction précoce, comme phénomène épi-campaniforme, de la métallurgie au Maroc. (Daugas,2002)

                                        





                                                        
                                           






Dans le Haut-Atlas, au sud de Marrakech, Jean Malhomme a effectué quelques sondages dans des stations de l'oukaïmeden. Malheureusement, les rapports de l'auteur sont peu précis. Dans une station de l'oukaïmeden, il a découvert quatre petites pièces métalliques, probablement en cuivre, dont une pointe de flèche. Dans la même région, le gisement de la Caze, fouillé également par J. Malhomme, a livré trois objets en cuivre: un croissant, un anneau et
une petite sphère.

Si dans la péninsule
ibérique voisine, la métallurgie du cuivre est connue avant
la civilisation du vase campaniforme, on est moins sûr
qu'il en soit de même au Maroc, quoiqu'il existe dans
certains sites quelques éléments qui permettent d'envisager
cette possibilité. Bien que les découvertes de vestiges appartenant au
Chalcolithique soient relativement nombreuses au Maroc par rapport au reste du Maghreb, de
nombreuses questions restent encore posées concernant cette
civilisation. A quoi est due la rareté des objets
métalliques attribuables à cette période? Ce n'est
certainement pas lié à la rareté de gisements de cuivre:
le Maroc en est pourvu dont certains ont connu une
exploitation ancienne. Cependant, nous n'avons, jusqu'à
présent, aucune indication sur l'exploitation de ce cuivre
pendant la protohistoire. Ce fait est dû vraisemblablement à la faible exploitation des gisements de métal. Il semblerait donc que les gens, par souci d'économie, aient récupéré le moindre objet de métal pour l'utiliser tel quel ou le refondre Ce constat a amené plusieurs
chercheurs à considérer tous les objets métalliques
découverts dans les gisements préhistoriques marocains
comme des pièces importées de la péninsule ibérique. De
telles opinions se fondaient sur la localisation de la
majorité des découvertes dans la seule bande littorale. Or,
les  récentes découvertes prouvent de jour en jour, que les objets
métalliques ont été utilisés dans des régions nettement
continentales. Il nous paraît hautement probable que les
objets métalliques ont été importés dans un premier temps
et ensuite fabriqués sur place en imitant les modèles
importés. Les découvertes d'objets en cuivre
associés à une industrie lithique et céramique
"Néolithique", à l'intérieur des terres, loin du littoral,
permettent de supposer que ces objets ont été fabriqués
localement et le voisinage de gisements de cuivre encore
exploités actuellement est à prendre en considération.

Malgré que le répertoire des données  concernant  la civilisation du vase
campaniforme  au Maroc, s’est enrichie ces dernières années,  beaucoup de questions restent encore sans réponses. La rareté des fouilles programmées et publiées
laisse entendre que cette civilisation est cantonnée dans
le triangle Nord-ouest du Maroc (Tanger-Fès-Casablanca)
ouvert sur l'Atlantique. Mis à part les gisements de Caf Taht
el Gar et de Gar Kahal  proches du détroit de Gibraltar, et le site de Hassi Ouenzga au Rif oriental, la côte méditerranéenne n'a livré aucun tesson
campaniforme. On ne saurait dire s'il s'agit vraiment d'un
état de faits ou si cette absence est  liée aux lacunes de
nos connaissances archéologiques. Il faut reconnaître que
la chaîne montagneuse du Rif ainsi que le littoral
méditerranéen ont rarement fait l'objet de recherches
scientifiques. Le programme de coopération maroco-allemande, développé depuis 1995 dans la région du Rif Oriental a permis de combler ce vide préexistant, et d’apporter de nouvelles données capables de bouleverser nos données sur le Néolithique et les âges des métaux.
.

La céramique campaniforme du Maroc est sans doute
un produit de commerce et non un indice d'émigration de
populations Sud-ibériques. Ce qui nous amène à privilégier
cette hypothèse, c'est que cette céramique n'est
accompagnée d'aucun autre élément caractéristique de la
civilisation du vase campaniforme du Sud de la péninsule
ibérique. Les populations
qui ont fabriqué le vase campaniforme dans la partie
méridionale de la péninsule ibérique vivaient dans des
villages organisés; leurs sépultures sont de type
mégalithique et contiennent un riche mobilier funéraire. Elles connaissaient déjà une métallurgie du cuivre très développée. En même temps, elles ont développé leur industrie du  silex notamment des pointes de flèches
finement taillées et retouchées. Il est vrai que les gisements marocains ne présentent
pas ces caractéristiques. L'industrie lithique associée aux
tessons campaniformes est pauvre et décadente. Nous ne
savons absolument rien sur les types de sépultures adoptés
par les populations du campaniforme marocain. Il est très vraisemblable que la céramique
campaniforme marocaine a été introduite dans une culture
régionale de la fin du Néolithique. Les objets métalliques
abondants dans les sites campaniformes ibériques, sont
pratiquement absents au Maroc. En outre, la quasi totalité des tessons campaniformes trouvés au
Maroc provient des grottes, mais on ne peut en déduire  que  
l 'habitat en grotte était le plus fréquent à cette époque
ou s'il s'agit simplement du hasard des découvertes. 
Toutefois, si dans la péninsule ibérique les habitats se
sont déplacés des grottes aux villages organisés dès le
Chalcolithique, au Maroc, dans l'état actuel de nos
connaissances, il faut attendre la phase finale de l'Age du
bronze pour voir un phénomène comparable se reproduire.


 
Plusieurs auteurs ont  avancé et soutenu l’idée qu’il ne faut pas parler de
civilisation du vase campaniforme au Maroc. Ils justifient
leur opinion par la rareté des éléments de cette
civilisation et leur apparition dans un environnement
culturel radicalement différent de celui de leur pays
d'origine: l'Andalousie et le Portugal. Cette localisation littorale des gisements a amené plusieurs chercheurs à penser que tous les éléments de la civilisation du vase campaniforme trouvés au Maroc ont été importés du sud de la péninsule ibérique. Cette hypothèse reposait sur une certaine analogie dans les formes céramiques et les objets métalliques des deux rives du détroit de Gibraltar. Or, les dernières découvertes concernant cette période montrent que les objets campaniformes ont été également utilisés dans des régions très éloignées du littoral. Compte tenu de la multiplication des découvertes de sites campaniformes, il
est désormais difficile de continuer à nier une véritable
implantation de cette civilisation au Maroc. Nous pensons
qu'il ne s'agit pas d'une simple appropriation, par les
populations tardo-néolithiques du Maroc, de pièces toutes faites 
en  péninsule ibérique, mais d’une  fort vraisemblable fabrication sur place. d'ailleurs, plusieurs  éléments
archéologiques permettent d'appuyer notre hypothèse
. A Dar-es-Soltan on a découvert une spatule
dentée en os qui a servi, sans aucun doute, à réaliser des
décors typiquement campaniformes. Cette possibilité d'une
fabrication sur place est d'autant plus plausible que les
poteries campaniformes sont moins fines que celles de la
péninsule ibérique et les décors ne se rattachent pas tous
au répertoire décoratif du campaniforme ibérique.
Les analogies entre  la céramique précampaniforme de "type skhirat" et la céramique campaniforme  sont tellement frappantes, qu'il est parfois difficile de les differencier. Ces similitudes  sont trop évidentes, et trop nombreuses à un tel point qu’on puisse songer à une filiation directe . La présence dans le matériel céramique de Skhirat des formes carénées, les vases à fond plat, la finesse de la pâte, l'incrustation en blanc, la disposition des décors en métope, l'alternance des bandes vierges et décorées, la prédominance des chevrons, des arrêtes de poissons, des résilles comme thèmes décoratifs, l'impression à la cordelette, ainsi que la répartition des décors sur la totalité de certains récipients  témoignent d'une "ambiance campaniforme".(Daugas,1987).

Les observations dont on dispose actuellement, notamment Les datations absolues, accréditent l'hypothèse d'u caractère évolutif de la céramique pré- campaniforme, que ce soit à El Kiffen ou à Skhirat. La typologie du décor et des formes céramiques témoigne en faveur d'une filiation conséquente entre les cultures du  Néolithique final  du littoral marocain et le Chalcolithique, qu’il soit précampaniforme ou protocampaniforme ou simplement campaniforme. On serait tenté de  voir dans cette culture régional cantonnée dans les plaines atlantiques, matérialisée par le style El Kiffen – Skhirat, une espèce de symbiose trois composantes différentes, à savoir le substrat local imprégné d’influences sahariennes remontées par la voie atlantique, et d’influences également atlantiques en provenance du   sud de la péninsule ibérique.







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  par : Doukali hassna 




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